Poemas de Déborah Heissler

(EXTRACTO)

 

 

Guarda silencio                                                                      has hablado durante mucho tiempo

 

Encima de los árboles y los prados, en el instante mismo en que cesa la lluvia, se escucha recomenzar el canto de la curruca líquido y límpido a la vez —goteo obstinado en el corazón de las hojas.

 

 

Y luego

 

las nubes, bajas, espesas, sus agujeros móviles sobre la melena de las praderas, hasta el horizonte. Alabanza del agua y de la luz, transportada tan rápido por el viento. Versátil, atmosférico, el esbozo de aire crudo y blanco, en los pliegues de la hierba como un cántico. Dicha de un instante observando las flores resplandecientes, entre los festones de sombría viña virgen, la tierra hasta el horizonte y la cima de la noche que se enciende. Los cerezos no son más que penachos de nieve.

 

Otra tarde se eleva lentamente en mí. Cada día, cada hora casi, declina tantos nuevos atractivos que suenan parecidos a nuevas armonías, quizás buenas.

 

 

Recuerdo

 

el azul de los nubarrones de tormenta y el de la fuente, el azul de la salvia hecho para ser frotado en la mano. El abandono, el obsequio, solo eso. Los últimos árboles florecidos en los jardines. La lluvia de junio que cae como un susurro universal, sobre el camino de hierba y violetas mezcladas — y la frescura del anochecer que te sujeta.

 

 

Las marcas de la dulzura                                                                                            y la muerte

 

Es entonces que el sendero renace de pronto entre los juncos y la arboleda comienza. Aquí y allá, grandes círculos de plumas dispersas, porque hay alivio, apertura, prolongación de la luz. Es ella que da color a toda la colina más allá de los troncos, como una pesada estofa rameada en la que la helada franja de sombra se alarga a cada segundo.

 

Todo recomienza. Marchamos bajo una luz nueva, proyectada sobre las brumas o las humaredas. Pocas nubes, sin peso, blancas ellas también. Algo que está en el límite de lo no formulado, que solo dos o tres palabras sugieren y que sin embargo se revela al espíritu.

 

Todo esto no es más matices, calmo crujido que se escucha sordo en el corazón de la hierba nueva, unida a los juncos, a las hierbas altas, en los pantanos. Las matas de anémonas y las primaveras arden y se apagan una a una, demasiado sombrías para que hablemos de llamas. ¿Púrpuras? Sin embargo son “solo” flores.

 

Y el enigma se manifiesta de repente en el nacimiento de cada primavera.

 

 

Nada

 

más imposible que este intercambio, al final de la noche, con insistencia, entre una figura irreal y algunos hitos cristalinos — será solo el viejo deseo de resolver este enigma que una vez más nos embarga, a ti y a mí en el jardín.

 

 

 

 

 

 

Garde le silence                                                                                  tu as longuement parlé

 

Au-dessus des arbres et des près, à l’instant même où cesse la pluie, on entend recommencer le chant de la fauvette à la fois liquide et limpide — goutte-à-goutte obstiné au coeur des feuilles. Ostinato.

 

 

Et puis

 

les nuages, bas, épais, leurs trouées mobiles sur la toison des prairies, jusqu’à l’horizon. Louange de l’eau et de la lumière, emportée si vite par le vent. Versatile, atmosphérique, l’esquisse de l’air cru et blanc, dans les plis de l’herbe comme un cantique. Bonheur d’un instant à regarder les fleurs éclatants, parmi les festons de sombre vigne vierge, la terre jusqu’à l’horizon et la crête de la nuit qui s’enflamme. Les cerisiers ne sont presque plus que des panaches de neige.

 

Un autre après-midi se lève lentement en moi. Chaque jour, chaque heure presque décline, autant d’appâts nouveaux qui sonnent, semblables à des harmonies nouvelles peut-être bien.

 

 

Je me souviens

 

le bleu des nues d’orage et celui de la source, le bleu de la sauge fait pour être froissé dans la main. L’abandon, le don, cela seul. Les derniers arbres fleuries dans les jardins. La pluie de juin qui tombe comme un chuchotement universel, sur un chemin d’herbe et de violettes mêlées — et la fraîcheur du soir qui vous saisit.

 

 

 

 

Les marques de la douceur                                                                                         et la mort

 

C’est alors que le sentier renaît tout à coup parmi les roseaux et que le bosquet commence. ça  et là, de grands cercles de plumes éparses, parce qu’il y a allégement, ouverture, allongement de la lumière. C’est elle qui colore toute la copine au-delà des troncs, comme une lourde étoffe à ramages où la frange d’ombre glacée s’élargit de seconde en seconde.

 

Tout recommence. On marche dans une lumière nouvelle, portée au-dessus des brumes ou des fumées. Peu de nuages, sans poids, blancs eux aussi. Quelque chose qui est à la limite de l’informulé, que seuls deux ou trois mots suggèrent et qui pourtant éclate à l’esprit.

 

Tout cela n’est que nuances, calme bruissement que l’on écoute sourdre au coeur de l’herbe nouvelle, liés aux roseaux, aux herbes hautes, aux marais. Les touffes d’anémones et les primevères flambent et s’éteignent une à une, trop sombres pour quant parle de flammes. Pourpres ? Ce ne sont “que” des fleurs cependant.

 

Et l’énigme point à la naissance de chaque printemps.

 

 

Rien

 

de plus impossible que cet échange, à la fin de la nuit, avec insistance, d’une figure irréelle et de quelques repères cristallins — ne serait-ce que le vieux désir une fois encore qui nous saisit, toi et moi dans le jardin, de résoudre cette énigme.

 

 

 

Extraído de DÉBORAH HEISSLER, Comme un morceau de nuit, découpé dans son étoffe, Éditions Cheyne, Chambon-sur-Lignon, Francia, 2010.

Traducción y presentación de Mariano Rolando Andrade.